Anamnèse, glandes lymphatiques, angiotensine ou encore maladie de Bouillaud, autant de termes qui n’évoquent rien à la majorité du commun des mortels… Pourtant, des traducteurs doivent, à l’occasion, comprendre, assimiler et transposer ces expressions médicales dans une autre langue. En traduction, la spécialisation médicale, qui représente un réel marché en soi, est tant trépidante que diversifiée et implique une grande part de responsabilisation et de soucis de l’exactitude. Tous types de documents passent entre les mains de ces jongleurs des mots, de la notice d’un médicament aux ouvrages de recherche clinique en passant par des protocoles d’étude et des consentements éclairés.

La médecine étant un domaine délicat, de bonnes compétences en traduction ne sont pas toujours suffisantes pour mener à bien une mission. Selon Michèle Lemaire, neuropsychiatre et traductrice, « on ne peut pas devenir traducteur sans avoir un vécu, une expérience dans son domaine de spécialisation. On devient difficilement traducteur médical sans formation théorique et pratique dans le domaine, pas forcément comme chirurgien, les infirmiers aussi connaissent le vocabulaire. » En effet, bien qu’il s’agisse d’un métier collaboratif qui bénéficie de nombreux outils d’aide, tels que des mémoires et glossaires, l’exercice de la traduction médicale relève parfois de la haute voltige !

Pourtant, rares sont les médecins qui, après tant d’années de formation et d’intenses expériences, décident de se reconvertir, comme l’a fait Michèle. Si l’on ne faisait appel qu’à d’anciens praticiens, un manque cruel de professionnels de la traduction médicale se ferait ressentir. Place alors aux jeunes moins expérimentés qui, pour se préparer au mieux à la mission qui les attend, doivent avant tout apprendre, comprendre, se renseigner et étudier. Michèle nous explique : « D’abord, on fait des recherches, surtout sur Internet, puis on se plonge dans son texte. La médecine évolue vite, si un terme n’existe pas dans les mémoires, il faut le tester, exploiter les moteurs de recherche, discuter avec des pairs, vérifier son usage dans la langue française et dans un domaine semblable,… »

Ainsi, il incombe au traducteur de réaliser un réel travail terminologique, à la fois minutieux et détaillé, en épluchant des articles médicaux et scientifiques, divers publications et ouvrages de référence et des périodiques. Et ce, malgré les obstacles qui se présentent au traducteur, tels que les néologismes, les technicités terminologiques, les acronymes et sigles, les appellations et noms de personnages, abondants en médecine. Ajoutons à ces difficultés les obstacles et pièges à éviter propres à la traduction en général, tels que la polysémie ou l’actualisation de la terminologie, qui peuvent faire de leur tâche un véritable casse-tête chinois !

Qui plus est, les médecins n’étant pas des linguistes de renom – ils en sont pardonnés –, ils utilisent régulièrement une stylistique, une phraséologie, un registre qui leur est propre. « Le problème, surtout dans la recherche clinique et les rapports médicaux, c’est que les médecins manquent de style, il y a un laisser-aller dans l’écriture qui rend la traduction compliquée. Certains textes sont de mauvaise qualité parce qu’il ne leur est pas demandé de bien parler. Donc, certains traducteurs travaillent au mot à mot, sans respecter l’art d’écrire. Pourtant, même les protocoles médicaux pourraient être agréables à lire », avance Michèle.

Heureusement, tout travail de traduction qui se veut éthique et professionnel sera relu et révisé par des pairs, des professionnels du domaine médical, qu’ils soient docteurs, pharmaciens, infirmiers ou autre, qui tâcheront d’opérer un solide travail de révision des textes. Néanmoins, en dépit de tout le soin accordé à la traduction, l’erreur est humaine et il arrive qu’elle se glisse dans le travail du traducteur. Le plus souvent, il s’agit de détails, comme le non-respect d’une mesure, des kilos transformés en grammes ou des virgules mal placées dans les décimales, et rares sont les fois où ces fautes ont eu des conséquences alarmantes. Grâce au travail des réviseurs, des outils de TAO – traduction assistée par ordinateur – et d’assurance qualité, de telles erreurs sont généralement identifiées et l’on évite ainsi de graves fautes de posologie ou de respect des quantités, par exemple.

Les enjeux et difficultés de la traduction médicale

Le cas de l’interprétation

L’interprétation – de liaison – permet de faire le lien entre un docteur et un patient lorsqu’ils sont séparés par la barrière langagière. Dans ce cas, l’interprète joue un rôle de médiateur entre l’instance médicale et un malade ou sa famille, lors de consultations ou d’interventions. Anna Davies, traductrice et interprète, témoigne : « On attend de nous un conseil, des fois on joue quasiment les psychologues, on est à l’écoute, notre présence soulage et rassure le patient. » Ensuite, elle évoque les principales difficultés de son métier : « Une consultation peut durer très longtemps ; pour ma part, il m’est arrivé d’interpréter pendant 12 heures, lors d’un accouchement. On fait face à la fatigue. Parfois aussi, côté émotionnel, quand on évoque le cancer ou qu’il s’agit d’un patient dont le pronostic vital est engagé, c’est à nous d’apporter la nouvelle à la famille. »

Selon elle, tout est dans la préparation et la pratique : « Je pense qu’il n’est pas nécessaire d’avoir un diplôme dans le domaine médicale, car soit on est médecin, soit interprète. Par contre, il faut s’y préparer, connaître le vocabulaire. Si je dois assister à une opération chirurgicale, je me prépare pour savoir comment on opère, quelle partie du corps est concernée, à quel type de question s’attendre et j’étudie la physionomie. Souvent, les hôpitaux proposent des petits feuillets d’explication pour les familles, qui nous sont très utiles. »

Le maître mot de la traduction médicale : la justesse. Toute opération requiert un regain de concentration et de professionnalisme, le traducteur médical doit avoir soif de connaissances dans son domaine. En outre, il lui est demandé d’effectuer des tâches d’édition et de formatage, qui le détournent du simple fait de traduire. Enfin, ces tâches, qui devraient être réservées aux éditeurs et terminologues, l’empêchent de se concentrer sur l’apprentissage médical pour fournir un service de qualité à toutes les personnes qui dépendent réellement de son travail.

Journaliste : Michel

Michel, professeur de yoga à Paris, donne de précieux conseils sportifs, mais également nutritionnels.

Michel

Michel, professeur de yoga à Paris, donne de précieux conseils sportifs, mais également nutritionnels.

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